dimanche 8 avril 2012

Les étudiants BS


Depuis plusieurs semaines, les étudiants de niveau universitaire et collégial, tentent d'attirer l'attention de la population - et surtout, du gouvernement - sur leurs misérables conditions de vie et sur l'agression sauvage qu'on s'apprête à leur faire subir, en l'occurrence, une hausse des droits de scolarité.

À qui en demande-t-on davantage?

Comme ceux qui les ont précédé, la génération estudiantine actuelle possède une pauvre culture politique et économique - tellement pauvre, du reste, que d'utiliser le verbe "posséder", relève d'une vue de l'esprit.

Or, pour ces étudiants, il paraît sensé de demander au gouvernement, et à la société en général, d'en faire davantage pour leur permettre, à eux, d'étudier sans avoir à subir quelque stress financier que ce soit, ni avant, ni pendant, ni après leurs précieuses études. Bref, une vision, certes idéaliste, mais relevant davantage du conte de fée que d'un certain réalisme issu d'une capacité de discernement et de connaissances économiques, politiques et sociologiques  élémentaires.

Je vais faire abstraction de toute l'indécence contenue dans les demandes des étudiants. Indécence qui s'apparente à celle du détrousseur de cadavre ou à celle de l'enfant prodigue qui exigerait de ses frères et sœurs, une partie de leur héritage.

Je ne dirai mot sur cette génération d'enfant-rois qui ont toujours fini par obtenir tout ce qu'ils voulaient, au moyen de protestations sous forme de crises ou de complètes désorganisations physiques et mentales.

Je n'insinuerai pas, non plus, que les étudiants se fichent éperdument de la qualité de l'enseignement et de la valeur du diplôme qu'ils reçoivent.

Et finalement, très loin de moi l'idée d'affirmer que les étudiants ne sont, ni plus ni moins que des "free loaders" produits par notre sacro-saint modèle québécois.

La raison de ces omissions est simple: on me taxerait de démagogie et je suis sensible.

Trêve de plaisanteries. Ce n'est que parce que, selon moi, ces théories, quoique plausibles, ne donnent pas une chance honnête aux étudiants de comprendre de quoi on les accuse. Ne serait-ce que parce qu'ils ne paient pas encore d'impôts; qu'ils n'ont jamais assumés de vraies responsabilités ou parce qu'ils n'ont jamais choisi de cours leur donnant une opportunité honnête de comprendre ce dont on parle.

On a énormément encouragé ces jeunes à s'exprimer durant leur enfance, et ce, même lorsqu'ils n'avaient absolument rien à dire ou même s'ils étaient incapable de structurer leur pensée clairement.

Maintenant, il faut les écouter, même lorsqu'ils n'ont rien à dire ou même quand leur discours - soit par manque de culture ou par ignorance crasse - manque cruellement de profondeur et de cohérence. Merci à leurs incompétents de parents et à la réforme pour nous avoir donné une génération compétente transversalement, mais carencée en termes de connaissances et de discernement.

Si ce qui se conçoit bien, s'énonce clairement et que les mots pour le dire viennent aisément, il est clair que ces jeunes sont démunis sur le plan des idées et de l'analyse de ces dernières.

Il y a un dernier point sur lequel je ne m'attarderai pas trop et qui devrait faire réfléchir même les étudiants les plus militants. C'est l'idée selon laquelle il est extrêmement facile de réclamer davantage de quelqu'un qui n'a pas de visage; qui est personne et tout le monde à la fois, bref, qui est une espèce de masse informe et indéfinissable, en l'occurrence, la société.

En sachant que les personnes, pour qui ces jeunes sont les plus importants, sont - sauf exceptions - leurs propres parents, il est une question qui se pose légitimement: si faire des études universitaires entièrement payées, à rabais ou - si l'on préfère - sans endettement résiduel, est si important pour les étudiants, pourquoi les gens qui les connaissent le plus et qui, par conséquent, les aiment le plus, n'ont pas pensé que c'était suffisamment important pour s'imposer davantage de sacrifices afin d'être en mesure de payer entièrement leurs études universitaires, à leurs propres enfants? Comment des étudiants fiers peuvent-ils demander à la société et au gouvernement de le faire à la place de leurs propres parents?

Peut-être que chaque étudiant devrait plutôt manifester devant la maison de ses parents...

*****

En fait, je n'aborderai aucun des sujets mentionnés précédemment.

Je vais plutôt amener mon point en posant la question la plus pertinente qui n'a pas encore été posée jusqu'à maintenant, dans ce débat, et qui forcera les étudiants à argumenter en tenant compte des contraintes liées à leur choix :

À quelle partie de leur liberté sont-ils prêts à renoncer en échange d'études à rabais, voire gratuites, et ce, sans qu'ils n'aient à contracter de dettes ?

Payer c'est choisir. Qu'on soit de gauche, de droite ou perdu, si on sort de l'argent de nos poches, on veut avoir notre mot à dire et c'est tout à fait normal.

De plus, ce désir et/ou besoin a tendance à s'amplifier en fonction du prix relatif du bien ou service pour lequel on paye.

Si vous vous achetiez une automobile, accepteriez-vous que le vendeur choisisse le modèle, les options, la couleur ainsi que le niveau d'usure dudit véhicule, à votre place, en plus d’en fixer le prix? Sûrement pas.

Et si vous vous achetiez un iPad...

Imaginons un scénario catastrophe: Jean "Paillasson" Charest craque sous la pression - pas sous les arguments, car il faut conserver un minimum de réalisme - et, fait plus que marche arrière. Non seulement, il accorde la gratuité scolaire aux étudiants de niveau universitaire mais il leur garantit de sortir de l'université sans dettes.

Dans cet exemple, ce sont les contribuables qui paient. Ils auront donc leur mot à dire.

Que pourraient-ils exiger des étudiants et/ou du système scolaire ?

N'oublions pas qu'ils veulent en obtenir, au minimum, pour leur argent et qu'un contrôle strict, des coûts, soit exercé. C'est bien beau de payer pour une chose, mais à un moment donné, il faut savoir combien ça coûte pour faire une analyse coût/bénéfice digne de ce nom et pour savoir où on s'en va.

Voici quelques exemples de ce que les payeurs pourraient exiger :

§  Interdiction de changer de programme à moins d'avoir remboursé entièrement à l'université et à l'État les cours déjà suivis;

§  Contingentement en fonction des perspectives d'emploi;

§  Appariement des étudiants aux programmes en fonction des aptitudes et du potentiel de réussite dudit programme;

§  Un second bacc sera à la charge entière de l'étudiant;

§  Le bacc devra être suivi à raison de minimum 2 sessions par an, sur une période 3 ou 4 ans, selon ce qui est prévu pour le programme;

§  Un bacc ne pourra être interrompu sous aucune considération, sauf pour des raisons de santé majeures qui devront être confirmées par l'équipe médicale de l'établissement d'enseignement;

§  Les diplômés ne pourront s'établir ni travailler hors de la province à moins de rembourser intégralement le coût de leurs études. Une réduction équivalent à 1/35 des coûts de leurs études universitaires, par année complète de travail au Québec, pourra leur être consentie;

§  L'aide financière aux étudiants sera octroyée sous forme de bourses afin de combler les besoins en logements, en alimentation et en déplacements des étudiants;

§  Les bourses seront versées sous forme de coupons échangeables. La carte d'identité étudiante devra être présentée, à chaque fois, pour que les coupons soient acceptés;

§  Aucun alcool ni produit du tabac ne pourra être obtenu en échange de ces coupons;

§  Les étudiants devront obligatoirement fréquenter l'université, la plus près de la résidence de leurs parents, offrant le programme dans lequel ils ont été admis. Les étudiants qui devront quitter la résidence familiale, devront obligatoirement habiter dans les résidences du campus ou dans des appartements subventionnées par l'État et prévus à cet effet;

§  Afin de ne plus nuire à la productivité du reste de la population, il ne sera plus permis aux étudiants de posséder de permis de conduire ni de posséder d'autos et encore moins de pouvoir se présenter à l'université en automobile, en moto ou en scooter. Seuls la marche, le vélo et le transport en commun seront autorisés;

§  Le travail des étudiants universitaires sera dorénavant interdit;

§  La période estivale sera consacrée à des stages NON rémunérés et obligatoires pour l'obtention du diplôme;

§  Pour favoriser l'apprentissage et la réussite académique, les étudiants universitaires devront se soumettre à des tests physiques semestriels obligatoires servant à mesurer leur capacité et leur forme physique. Ceux qui échoueront, se verront expulsés de l'université et seront présumés avoir abandonné leurs études avec l'obligation de rembourser qui s'y rapporte;

§  Les outils de travail de l'étudiant seront fournis par leur université incluant un laptop certifié "government approved" de couleur rouge et peinturé au rouleau. La revente sera interdite et il demeurera en tout temps la propriété de l'université;

§  Il sera désormais interdit à toutes  banques, caisses et tous types d'institutions financières, de prêt ou de crédit, d'octroyer tout type de crédit à un étudiant;

§  Les universités auront l’obligation, à chaque session, de remercier les étudiants n’ayant pas atteint un certain niveau de performance scolaire afin de faire de la place pour de plus prometteurs.

Évidemment, les étudiants ainsi remerciés ne seront pas tenu de rembourser les cours suivi jusque-là.

Je pourrais continuer ainsi encore longtemps, mais c'est clair que tout le monde a saisi depuis le deuxième exemple.
D'ailleurs, vous ne trouvez pas que ça ressemble étrangement à un système qui a démontré sa faillite depuis longtemps. Le carré rouge lui sied à merveille.

Maintenant que tout le monde a compris, je pose de nouveau la question : "À quelle(s) partie(s) de votre liberté êtes-vous prêt à renoncer afin de profiter d'études universitaire à rabais, gratuites et/ou ne causant aucun endettement résiduel ?"

Et, si vous êtes en mesure d'identifier des pans de votre liberté que vous êtes prêts à sacrifier, je vous pose une dernière question...

Putain! Mais où est votre fierté ?

Yannick Gagné
Libre@penseur
6 avril 2012